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Comment ne pas relire Nadia Tuéni, poète libanaise d’expression française née à Baakline au Liban le 8 juillet 1935 et morte à Beyrouth le 20 juin 1983. Elle a vécu les guerres qui déchirent son pays, et ses mots de douleur et d’exil sont hélas encore tellement actuels… (traduction du poème extraite d’un article en préparation pour la revue italienne Le Ortique)

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Quand on est seul

Je veux dire quand on a le mal des fleurs,

que l’on fait à genoux le tour de soi-même,

il ne reste que deux yeux sur le mur. Quand on est seul

comme un oiseau royal,

déjà le jour impose l’horizon.

Si l’enfant est en deuil,

ce n’est pas par hasard qu’on crucifie à l’aube. Quand on est seul

avec la pluie dans un verre d’eau,

un bateau contre la fenêtre,

et des voyages à perte de vue,

un sourire saigne alors

sur ton visage loin comme une cicatrice. Quand on est seul

sans maison sous la lune

ni même une odeur de chemin,

sans désert dans la main,

que faire à cet instant précis

de tous les mots qui meurent ?

Tuéni, Nadia. Poèmes pour une histoire (French Edition) (p. 12). (Seghers) réédition numérique FeniXX. Édition du Kindle.

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Quando si è soli

Voglio dire, quando si è stufo dei fiori,

che si fa in ginocchio il giro di se stesso,

rimangono soltano due occhi sulla parete. Quando si è soli

come un uccello reale,

già il giorno impone l’orizzonte.

Se il bambino è in lutto,

non a caso  si crocifigge l’alba. Quando si è soli

con la pioggia in un bicchiere d’acqua,

una nave contro la finestra,

e viaggi a perdita d’occhio,

un sorriso  allora sanguina

sul tuo viso lontano come una cicatrice. Quando si è soli

senza casa sotto la luna

nemmeno un odore di sentiero,

senza deserto nella  mano,

cosa fare in quel preciso momento

di tutte le parole che muoiono?

trad. Marilyne Bertoncini